mardi 29 novembre 2016

La renaissance

Mettre fin à la souffrance, c’est entrer en contact avec la mort de votre vivant – en mourant à votre nom, à votre maison, à vos biens, à votre cause, de sorte que vous débordiez de fraîcheur, de jeunesse, de lucidité, et que vous puissiez voir les choses telles qu’elles sont, sans la moindre distorsion. C’est ce qui va se passer à l’heure de votre mort. C’est dans cette mort de chaque instant au « moi » qu’est l’éternité, qu’est l’immortalité, et qu’il est une chose dont il faut faire expérience …La quête de l’immortalité par la réincarnation est essentiellement égoïste, et n’est donc pas conforme à la vérité. Votre quête d’immortalité n’est qu’un autre aspect du désir de pérenniser des réflexes d’autodéfense qui vont à l’encontre de la vie et de l’intelligence. Toute chose dotée d’une continuité ne peut jamais se renouveler...La notion de continuité d’une âme destinée à renaître, encore et sans fin, n’a donc pas le moindre sens, parce que ce n’est qu’une invention née d’un esprit qui a peur, qui veut perdurer, qui cherche dans la permanence un recours de durée, et qui a besoin de certitude, parce qu’en elles est l’espérance.
Peut-il  y avoir une action qui ne soit pas fondée sur l’idée ? L’idée, c’est la continuation d’hier sous une forme modifiée, et cette continuation va conditionner demain, ce qui signifie que toute action fondée sur l’idée ne peut jamais être libre. Tant que l’action aura pour fondement l’idée, elle engendrera inévitablement des conflits ultérieurs. (…) Tant que l’action est le fruit du passé, elle ne peut jamais être libre ; or ce n’est que dans la liberté que l’on peut découvrir la vérité. Ce qui se passe, en fait, c’est que l’esprit, n’étant pas libre, ne peut pas agir : il ne peut que réagir, et c’est la réaction qui est la base de nos actions. Nos actions, loin d’être des actions, ne sont que le prolongement de réactions, car elles sont l’expression de la mémoire, de l’expérience, des réponses d’hier . La question qui se pose est donc celle-ci : l’esprit peut-il se libérer de son conditionnement ? 
Krishnamurti : Le livre de la méditation et de la vie
15 novembre
Mourir sans discussion
(…) La mort, lorsqu’elle vient, n’argumente pas avec vous. Pour lui faire face, vous devez, chaque jour, mourir à toute chose : à votre angoisse, à votre solitude, aux relations auxquelles vous vous accrochez ; vous devez mourir à vos pensées, mourir à vos habitudes, mourir à votre femme afin de la regarder avec des yeux neufs ; (…) Mais vous ne pourrez pas affronter la mort si vous ne mourrez chaque jour. Ce n’est que lorsqu’on meurt que naît l’amour. L’esprit qui a peur est dénué d’amour – il a des habitudes, il a de la sollicitude, il peut se forcer à être bon et superficiellement attentionné. (…) Mais notre mort aux choses physiques est limitée. Nous admettons, en toute logique et en toute raison, que l’organisme cesse un jour de vivre. C’est pourquoi nous nous inventons une vie, tissée de tout notre vécu – tissée de nos angoisses quotidiennes, de notre insensibilité quotidienne, (…),  cette vie que nous voudrions perpétuer, nous l’appelons l’ « âme » - qui est, selon nous , ce qu’il y a de plus sacré, qui participe du divin, alors qu’elle fait toujours partie de votre pensée et n’a donc rien à voir avec la divinité. Telle est votre vie ! 

16 novembre
Dans la mort est l’immortalité
(…) Ce n’est que dans la mort qu’il naît quelque chose de neuf. (…) Or le fait réel, c’est que toute chose qui se perpétue ne peut connaître ni renaissance, ni renouveau.
C’est dans cette mort de chaque instant au « moi » qu’est l’éternité, qu’est l’immortalité, et qu’il est une chose dont il faut faire expérience …
Lorsque vous n’avez plus peur parce qu’à chaque minute il y a fin et renouveau, alors vous êtes ouvert à l’inconnu. (…) Ce qui est authentique, c’est de voir la mort telle qu’elle est – une fin, une fin dans laquelle il y a renouveau, renaissance – pas une continuité. Car tout ce qui se perpétue finit par dépérir ; mais ce qui a le pouvoir de se renouveler est éternel.

17 novembre
La réincarnation est essentiellement égoïste
Vous voulez que je vous donne l’assurance que vous allez vivre une seconde vie, mais il n’est en cela ni bonheur ni sagesse. La quête de l’immortalité par la réincarnation est essentiellement égoïste, et n’est donc pas conforme à la vérité. Votre quête d’immortalité n’est qu’un autre aspect du désir de pérenniser des réflexes d’autodéfense qui vont à l’encontre de la vie et de l’intelligence. Cette insatiable soif de durée ne peut mener qu’à l’illusion. Ce qui compte, ce n’est donc pas de savoir si la réincarnation existe, mais de réaliser l’accomplissement total dans le présent même. Et cela n’est possible que lorsque votre esprit et votre cœur cessent de se protéger contre la vie.

18 novembre
Qu’est-ce que la réincarnation ?
(…) Essayons de trouver si le « je » est en essence quelque chose de spirituel. Et par spirituel nous entendons, n’est-ce pas, quelque chose qui n’est pas susceptible d’être conditionné, qui n’est pas une projection de l’esprit  humain, qui n’est pas dans le champ de la pensée, quelque chose qui ne meurt pas. Lorsque nous parlons d’entité spirituelle, nous désignons par-là quelque chose qui ne se limite pas au champ de l’esprit, de toute évidence. Le « je » est-il une entité spirituelle correspondant à ces critères ? Si tel est le cas, il faut qu’il transcende toute notion de temps, et par conséquent il ne peut ni renaître ni perdurer… Toute chose dotée d’une continuité ne peut jamais se renouveler. Tant que la pensée se perpétue à travers la mémoire, à travers le désir, à travers l’expérience, elle ne peut jamais se renouveler ; et donc, ce qui perdure est inapte à connaître le réel.

19 novembre
L’âme existe-t-elle ?
(…) L’âme a-t-elle une existence réelle ? Nous nous plaisons à croire en ce quelque chose qui est l’âme, nous l’avons placé au-delà de la pensée, au-delà des mots –toujours au-delà. Ce quelque chose est éternel, spirituel ; il ne mourra jamais – voilà pourquoi la pensée s’y accroche. Mais existe-t-elle vraiment, cette âme – cette chose au-delà du temps, au-delà de la pensée, cette chose qui n’est pas une invention de l’homme, qui transcende la nature humain, cette chose qui n’est pas élaboration de l’esprit roué – existe-t-elle ? Car l’esprit ne voit dans la vie qu’incertitude et confusion immenses, et rien de permanent – rien. (…) Rien n’a de permanence. Et c’est ainsi que l’esprit invente ce quelque chose, qui est permanent et qu’il appelle l’âme. Mais puisque celle-ci est concevable par l’esprit, concevable par la pensée, (…) elle reste toujours inscrite dans le périmètre du temps. Si je peux concevoir une chose, c’est qu’elle fait partie de ma pensée. (…) L’âme reste donc confinée dans les limites du temps. La notion de continuité d’une âme destinée à renaître, encore et sans fin, n’a donc pas le moindre sens, parce que ce n’est qu’une invention née d’un esprit qui a peur, qui veut perdurer, qui cherche dans la permanence un recours de durée, et qui a besoin de certitude, parce qu’en elles est l’espérance.

20 novembre
Qu’entend-on par « karma » ?
Le karma sous-entend, n’est-il pas vrai, la notion de cause et d’effet – l’action, fondée sur une cause, donnant lieu à un certain résultat, l’action née du conditionnement produisant de nouveau effets. La cause et l’effet sont-ils donc statiques, définitivement figés ?  L’effet ne devient-il pas à son tour une cause ? Il n’y a donc pas de causes fixes ni d’effets fixes.
(…) Tant que nous considérons la cause, l’arrière-plan, le conditionnement, comme étant sans lien avec l’effet, il y aura forcément conflit entre la pensée et cet arrière-plan. Le problème est donc beaucoup plus complexe que celui de savoir s’il faut croire ou non à la réincarnation, car la question est de savoir comment agir, et non s’il faut croire à la réincarnation ou au karma – deux notions qui sont absolument hors de propos.

21 novembre
Une action fondée sur l’idée
L’action peut-elle jamais nous libérer de cet enchaînement de causes et d’effets ? (…) C’est tout le processus du karma : la cause et l’effet ; et de toute évidence, ce mécanisme de causes et d’effets (…) mène en fin de compte à la douleur. Le véritable nœud de la question est le suivant : la pensée peut-elle être libre ? Toute pensée, toute action vraiment libre n’est ni cause de douleur, ni source de conditionnement. Tel est le point crucial de toute cette question.
Peut-il donc y avoir une action qui soit sans aucune connexion avec le passé ? Peut-il  y avoir une action qui ne soit pas fondée sur l’idée ? L’idée, c’est la continuation d’hier sous une forme modifiée, et cette continuation va conditionner demain, ce qui signifie que toute action fondée sur l’idée ne peut jamais être libre. Tant que l’action aura pour fondement l’idée, elle engendrera inévitablement des conflits ultérieurs. (…) Tant que l’action est le fruit du passé, elle ne peut jamais être libre ; or ce n’est que dans la liberté que l’on peut découvrir la vérité. Ce qui se passe, en fait, c’est que l’esprit, n’étant pas libre, ne peut pas agir : il ne peut que réagir, et c’est la réaction qui est la base de nos actions. Nos actions, loin d’être des actions, ne sont que le prolongement de réactions, car elles sont l’expression de la mémoire, de l’expérience, des réponses d’hier. La question qui se pose est donc celle-ci : l’esprit peut-il se libérer de son conditionnement ?


  

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