Pour libérer l’esprit
de tout conditionnement, il faut en avoir une vision totale, mais en l’absence
de toute pensée. La pensée ne peut jamais être libre : elle
est le fruit de notre conditionnement, de notre vécu, de notre culture, de
notre climat, de notre environnement social, économique et politique. Tout conditionnement est douloureux. Le désir d’être,
ou de ne pas être, entraîne le conditionnement.... Le fait d’être libéré du
conditionnement n’est qu’un produit accessoire, sans importance. L’important, c’est
de comprendre ce qui crée le conditionnement.
Je crois que c’est une des choses les
plus ardues que d’être conscient, parce que nous sommes happés par les
problèmes immédiats et leurs solutions immédiates, ce qui rend notre existence
très superficielle.
Si vous observez soigneusement votre pensée,
vous verrez que, bien que ses réactions soient très rapides, il y a des trous, des
arrêts entre une pensée et l’autre. Entre deux pensées il y a une période de
silence, laquelle n’est pas reliée au processus de la pensée. Si vous l’examinez,
vous verrez que cette période de silence, que cet intervalle, n’appartient pas
au temps... Si vous avez simplement conscience de l’ensemble
des structures de l’habitude, sans résistance, vous découvrirez alors qu’il est
possible de s’en libérer, et cette liberté débouche sur quelque chose de neuf.
Krishnamurti : Le livre de la méditation et la vie
22 mai
Toute pensée reste fragmentaire
Vous et moi
sommes conscients d’être conditionnés. Si vous dites, comme le font certains,
que le conditionnement est inévitable, alors le débat est clos : vous êtes
un esclave, et c’est terminé. Mais si vous commencez à vous demander s’il
serait peut-être possible de rompre ces servitudes, ce conditionnement, alors
le débat est ouvert. (…) Pour commencer, voyez simplement le problème, ne
cherchez pas de réponse, de solution. C’est un fait que nous sommes
conditionnés, et que toute pensée visant à comprendre ce conditionnement ne
sera toujours que fragmentaire, il n’y a donc jamais compréhension totale ;
or la liberté n’existe que dans la compréhension totale de tout l’ensemble du
processus de la pensée.
23 mai
Se libérer du moi
(…) Avez-vous déjà écouté, regardé, sans faire
intervenir tout ce mécanisme de réaction ? Vous allez dire qu’il est
impossible d’observer sans interposition de la pensée ; (…) voir, voir
tout simplement, est une tâche si ardue que nous la disons impossible. Je dis
que ce n’est que lorsque vous avez conscience – mais sans qu’il agisse d’une
réaction – de cette totalité de votre être, que s’efface le conditionnement, totalement
et jusqu’aux niveaux les plus profonds – et c’est cela, être véritablement
libéré du moi.
24 mai
Problèmes observés, problèmes envolés ?
Il est évident que toute
pensée est conditionnée. Il n’existe pas de pensée libre.
(…) Vos lectures mêmes, les pratiques qui vous sont propres, font partie
de ce vécu. (…) Alors, est-il possible d’être conscient, simplement conscient
de notre conditionnement, et rien de plus ? – dans ce cas là, il n’y a pas
l’ombre d’un conflit. Cette conscience même, pour peu qu’on lui donne l’occasion
de se manifester, est peut-être en mesure de réduire en cendres les problèmes.
25 mai
Aucun conditionnement n’est noble
(…) Ayant pris conscience du modèle ou du moule dans
lequel vous avez été élevé, vous voulez vous en libérer ; ce désir de
liberté ne conditionnera-t-il pas l’esprit
à son tour, mais d’une manière différente ? (…) Il y a d’un côté le désir
qui débouche sur le conformisme, et de l’autre le désir de liberté. (…) Ces
deux désirs ne sont-il pas fondamentalement semblables ? Et si tel est le
cas, cette quête de la liberté est vaine, indéfiniment. Il n’existe aucun
conditionnement qui soit noble ou meilleur qu’un autre. Tout conditionnement
est douloureux. Le désir d’être, ou de ne pas être, entraîne le
conditionnement, et c’est ce désir qu’il nous faut comprendre.
26 mai
S’affranchir du conditionnement
Le désir de se libérer du conditionnement a pour
seul effet de le renforcer. Mais si, au lieu d’essayer d’étouffer ce désir, on en
comprend tout le processus, cette compréhension même est ce qui permet de se
libérer du conditionnement. (…) Si je me fixe délibérément pour but de me libérer
de mon conditionnement, ce désir crée à son tour un autre conditionnement. Je
peux détruire une forme de conditionnement, mais je deviens victime d’une
autre. Alors, que si nous comprenons ce désir de libération, cette
compréhension même suffit à détruire tout conditionnement. Le fait d’être
libéré du conditionnement n’est qu’un produit accessoire, sans importance. L’important,
c’est de comprendre ce qui crée le conditionnement.
27 mai
Etre simplement conscient
(…) Je pense donc que notre questionnement ne doit pas avoir pour but de résoudre nos problèmes immédiats, mais de découvrir si le contenu de l’esprit – le conscient, mais aussi le niveau inconscient de l’esprit, où sont emmagasinés tous les souvenirs, toutes les traditions, tout l’héritage de l’espèce -, si tout cela, donc, peut être éliminé. Je crois que cela, n’est possible que si l’esprit est capable d’être conscient, sans aucune notion d’exigence, de pression – capable d’être simplement conscient.
(…) Je pense donc que notre questionnement ne doit pas avoir pour but de résoudre nos problèmes immédiats, mais de découvrir si le contenu de l’esprit – le conscient, mais aussi le niveau inconscient de l’esprit, où sont emmagasinés tous les souvenirs, toutes les traditions, tout l’héritage de l’espèce -, si tout cela, donc, peut être éliminé. Je crois que cela, n’est possible que si l’esprit est capable d’être conscient, sans aucune notion d’exigence, de pression – capable d’être simplement conscient.
(…) Je crois que la compréhension, le moyen de
pénétrer au cœur, au plus profond des choses, passe par la conscience - la simple
perception de nos pensées et de nos sentiments, sans condamnation, sans
comparaison -, la simple observation. Vous constaterez, si vous tentez l’expérience,
l’extraordinaire difficulté de la chose, parce que nous sommes essentiellement formés, rodés à condamner, à approuver, à comparer.
28 mai
28 mai
Rien dans l’esprit n’échappe au
conditionnement
Votre esprit est conditionné dans sa totalité :
rien en vous n’échappe au conditionnement. (…) quel est l’état de l’esprit au
moment où il sait qu’il est conditionné et qu’il réalise que tout effort visant
à se déconditionner est toujours de l’ordre du conditionnement ? Lorsque
vous dites : « Je sais que je suis conditionné », le
savez-vous vraiment ? (…) Lorsque je prends conscience du fait que je suis
conditionné, il y a action immédiate. Je n’ai aucun effort à faire pour me
déconditionner. Le fait même que je suis conditionné et la réalisation de
ce fait provoquent un éclaircissement immédiat. La difficulté réside dans l’absence
de réalisation du fait, c’est-à-dire dans l’incapacité d’en comprendre toutes
les implications, et dans l’impossibilité de voir que toute pensée – quelles qu’en
soit la subtilité, l’habileté, la sophistication ou l’ampleur philosophique –
est conditionnée.
29 mai
29 mai
Le fardeau de l’inconscient
Au plus profond de nous, dans notre inconscient, l’énorme
poids du passé nous pousse dans une certaine direction…
(…) Comment peut-on laver l’inconscient de tout son
passé, instantanément ? (…) Je vois que le processus analytique – qui suppose
du temps, une interprétation, le mouvement de la pensée sous forme d’un
observateur analysant la chose observée – est incapable de libérer l’inconscient ;
je rejette donc totalement le processus analytique. (…) Il n’y a plus un
analyseur séparé de la chose qu’il analyse : il est cette chose même, et
non une entité distincte. C’est alors que l’on s’aperçoit que l’inconscient n’a
que très peu d’importance.
30 mai
L’intervalle entre les pensées
(…) Comment l’esprit peut-il être libre ? L’esprit,
pour ce faire, doit non seulement voir et comprendre le mouvement pendulaire qu’il
décrit entre passé et futur, mais également avoir conscience de l’intervalle
qui sépare les pensées. (…) Il ne doit pas seulement voir et comprendre son
va-et-vient de balancier entre le passé et le futur, mais aussi percevoir les
intervalles entre deux pensées…
Si vous observez soigneusement votre pensée, vous verrez
que, bien que ses réactions soient très rapides, il y a des trous, des arrêts entre
une pensée et l’autre. Entre deux pensées il y a une période de silence,
laquelle n’est pas reliée au processus de la pensée. Si vous l’examinez, vous
verrez que cette période de silence, que cet intervalle, n’appartient pas au
temps, et la découverte de cet intervalle, se pleine perception, vous libère du
conditionnement, ou plutôt il ne « vous » libère pas mais il y a
affranchissement du conditionnement.
31 mai
Comment se forment les habitudes
(…) Il me semble que l’essence même de la liberté consiste
à comprendre tout le mécanisme des habitudes, à la fois conscientes et
inconscientes. La question n’est pas de mettre fin aux habitudes, mais d’en voir
toutes les structures. Il faut que vous observiez comment se forment les
habitudes et comment le rejet d’une habitude ou le fait de lui résister ne font
qu’en créer une autre. L’esprit
qui reste attentif seconde après seconde – attentif à ce qu'il dit, attentif au
mouvement de ses mains, de ses pensées, de ses sentiments – découvrira que
cette formation de nouvelles habitudes a cessé. Il est capital de comprendre
cela, car tant que l’esprit s’efforce de rompre ses vieilles habitudes, en
créant de nouvelles par ce processus même, il ne peut évidemment jamais être
libre ; et seul un esprit libre peut voir au-delà de lui-même.
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