lundi 25 juillet 2016

La douleur

La souffrance, c’est … le chagrin, l’incertitude, le sentiment d’une solitude absolue. La souffrance peut être liée à la mort, à l’incapacité à se réaliser, au fait de ne pas être reconnu, ou d’aimer sans être payé de retour. Il y a la souffrance consciente, et il y a la souffrance inconsciente, qui nous a été léguée en héritage au fil des siècles. L’homme a toujours cherché à vaincre cette chose extraordinaire que l’on nomme souffrance, chagrin, détresse, mais même lorsque nous sommes superficiellement heureux, que tous nos désirs sont comblés, les racines de la souffrance sont toujours là, tapies dans les replis profonds de l’inconscient. Donc, lorsque nous parlons de la fin de toute souffrance, nous voulons dire la fin de toute souffrance, consciente et inconsciente. Pour mettre un terme à la souffrance, il faut avoir un esprit très clair et très simple. La simplicité n’est pas une simple idée. Pour être simple, il faut beaucoup d’intelligence et de sensibilité.
Un esprit qui se préoccupe de comprendre la compassion, l’amour et tout le reste ne peut évidemment que comprendre ce qu’est la peur et ce qu’est la souffrance.
Krishnamurti : Le livre de la méditation et de la vie

8 juillet
La souffrance n’est pas ma souffrance
Votre souffrance individuelle est-elle différente de la mienne, (…) Les circonstances, les incidents peuvent varier, mais en essence la souffrance de l’autre est identique à la mienne, n’est - ce pas ? La souffrance est la souffrance, elle n’est ni la votre ni la mienne, bien sûr. Le plaisir n’est ni votre plaisir ni le mien – c’est le plaisir. Lorsque vous avez faim, cette faim ne concerne pas que vous, c’est aussi la faim de l’Asie tout entière. (…)
 C’est cela, voyez – vous, que nous refusons d’admettre. Nous ne voyons pas que nous ne sommes tous qu’une seule et même humanité. – mais tous enclos dans des sphères différentes, des zones différentes de l’existence. Quand vous aimez quelqu'un, ce n’est pas votre amour, Car alors il devient tyrannique, possessif, jaloux, angoissé, brutal. De même, la souffrance est la souffrance – non votre souffrance ou la mienne. (…) Quand un homme n’a ni nourriture, ni vêtements, ni maison, il souffre – qu’il vive en Asie ou en occident. (…) Comprendre cette souffrance – qui n’est ni à vous ni à moi, qui n’est pas non plus impersonnelle ou abstraite, mais réelle, et partagée par nous tous – est une chose qui requiert une grande pénétration, une grande lucidité de perception. Et la fin de cette souffrance apportera naturellement la paix, tant intérieure qu’extérieure. 

9 juillet
Il faut comprendre la souffrance 
Pourquoi vous ou moi sommes-nous si insensibles à la souffrance d'autrui ? (…) Pourquoi sommes-nous si endurcis ? (…) Si je comprends la souffrance, j’y deviens sensible, je deviens attentif à tout, non seulement à moi-même, mais à ceux qui m’entourent, à ma femme, à mes enfants, à l’animal, au mendiant. Mais nous ne voulons pas comprendre, et cette fuite devant la souffrance nous engourdit l’esprit et nous finissons par nous endurcir. . Le fait est que cette souffrance, si elle n’est pas comprise, nous engourdit l’esprit et le cœur, et nous ne comprenons pas la souffrance parce que nous voulons y échapper, en comptant sur un gourou, sur un sauveur, sur les mantras, la réincarnation, les idées, l’alcool et toute autre forme de dépendance – tout est bon pour échapper à ce qui est… Pourtant, comprendre la souffrance ne consiste pas à en découvrir les causes. Tout homme est à même de connaître les causes de la souffrance : sa propre inconséquence, sa stupidité, son étroitesse d’esprit, sa brutalité, ainsi de suite. Mais si je regarde la souffrance elle-même sans désir de réponse, que se passe-t-il alors ? Alors, n’étant pas en position de fuite, je commence à comprendre la souffrance ; mon esprit est attentif, alerte, vif, aiguisé, ce qui veut dire que je deviens sensible, et parce que je suis sensible, j’ai conscience de la souffrance des autres. 

10 juillet
Les croyances, rempart contre la douleur
La douleur physique est une réaction nerveuse ; mais la douleur psychique surgit lorsque je m’accroche à des choses qui me sont agréables, car je redoute alors tout ce qui pourrait m’en priver. Les accumulations psychologiques constituent un barrage à cette souffrance tant qu’elles ne sont pas menacées : je suis un paquet d'accumulations et d’expériences qui s’opposent à tout ce qui pourrait les déranger. Je refuse de me laisser déranger, donc j’ai peur, et c’est du connu dont j’ai peur, de ces accumulations physiques ou psychologiques dont je me suis entouré pour écarter la douleur ou pour empêcher l’affliction de se produire. Mais l'affliction est incluse dans le processus même de ces accumulations destinées à éviter la souffrance. Les connaissances aussi ont pour but de l'éviter. De même que les connaissances médicales sont utiles contre la douleur physique, les croyances  le sont contre la douleur psychique, et c’est pour cela que j’ai peur de perdre mes croyances, (…) Il peut m’arriver de rejeter certaines des croyances traditionnelles qui m’avaient été inculquées, et de m’appuyer sur une expérience personnelle qui m’éclaire et me donne force, compréhension et confiance en moi ; mais ces croyances et cette expérience sont de même nature : ce sont des moyens d’éviter la douleur. 

11 juillet
Une compréhension intégrale
Quel sens faut-il donner au mot « souffrance » ? Est-ce quelque chose dont vous êtes dissocié ? Est-ce une chose qui reste en dehors de vous – qu’elle vous affecte intérieurement ou extérieurement – et que vous observez, dont vous faites l’expérience ? N’êtes-vous que l’observateur en train de vivre l’expérience ? Ou s’agit-il d'autre chose ? C’est certainement là un point important, n’est-ce pas ? Quand je dis : « je souffre », que veux-je dire par là ? Suis-je distinct de la souffrance ? Là est la question, assurément.  (…) Comment puis-je comprendre la totalité de la souffrance ? Ce n’est que lorsque je suis capable de comprendre pleinement qu’il m’est possible d’être libéré de la souffrance. Mais si je suis écartelé entre des tendances contradictoires, alors la vérité m’échappe…
(…) Vous verrez qu’en présence d’un fait, d’une vérité, la compréhension apparaît  uniquement lorsque je suis capable d’appréhender ce tout, sans division – et non lorsqu’il y a séparation entre la souffrance et  le « moi » qui l’observe. Voilà la vérité.

12 juillet
Vous êtes la souffrance
Lorsqu’il n’y a pas un observateur qui souffre, la souffrance est-elle autre chose que moi-même ? Je suis elle. La douleur et moi ne sommes pas dissociés. Et alors que se passe-t-il ? Il n’y a pas de mot, pas d’étiquette, qui viennent écarter cette douleur en lui donnant un nom. Lorsque je ne la nomme pas, lorsqu’il n’y a pas de peur suscitée par elle, est-ce qu’il existe une relation entre la souffrance et le moi en tant que centre de conscience ? Si le centre est en état de relation avec cette souffrance, il en a peur. Mais s’il est cette souffrance même, que peut-on faire ? Il n’y a rien que l’on puisse faire. On est cela, on ne peut ni l’accepter ni le refuser, ni lui donner un nom. (…) Il n’y a plus de « je souffre », parce qu’il n’y a pas de centre pour souffrir. Le centre ne souffre que parce que nous  n’avons pas examiné ce qu’est ce centre. Nous ne vivons qu’en passant d’un mot à un autre mot, d’une réaction à une autre réaction.

13 juillet
La souffrance est-elle inévitable ?
Il existe tellement de variétés, de complexités et de degrés dans la souffrance. Nous le savons tous. (…) Si nous disons que la souffrance est inévitable, alors, il n’y a pas de réponse ; alors vous avez déjà cessé d’enquêter. (…) Vous pouvez fuir à travers l’autre, homme ou femme, ou dans l’alcool, les distractions, diverses formes de pouvoir, d’ambition sociale, de prestige, et dans le bavardage intérieur de votre néant ; les objets à travers lesquels vous fuyez prennent une importance colossale. Vous avez donc à votre tour fermé votre porte à la souffrance, comme la majorité d’entre nous…(…) Certes la souffrance physique existe. (…) Il y a aussi la peur des douleurs à venir, futures causes de souffrance.
La souffrance est étroitement liée à la peur, et sans compréhension de ces deux éléments essentiels de la vie, nous ne comprendrons jamais ce que c’est que d’être compatissant, aimant. 

14 juillet
Souffrance consciente et inconsciente
Il y a la souffrance consciente, et il y a la souffrance inconsciente, celle qui paraît sans fondement sans cause directe. C’est la souffrance consciente qui nous est le mieux connue, et nous savons aussi comment l’aborder. Ou bien nous la fuyons par le biais d’une croyance religieuse, ou bien nous la rationalisons, ou bien nous avons recours à une drogue quelconque – intellectuelle ou matériellement tangible ; ou bien nous nous grisons de mots, de distractions, de divertissement futiles. Malgré tous ces efforts, nous n’arrivons pas à nous défaire de la souffrance consciente.   Et puis il y a la souffrance inconsciente, qui nous a été léguée en héritage au fil des siècles…


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