jeudi 8 septembre 2016

L'intellect

Nous disposons presque tous de capacités intellectuelles développées – ces capacités prétendues intellectuelles ne l’étant que de nom… A force de cultiver cet intellect - ou prétendu tel - nous avons perdu toutes les autres aptitudes, toutes les autres formes de sensibilité, et cela nous pose le problème de savoir comment rééquilibrer notre existence, non seulement afin de disposer des plus hautes aptitudes intellectuelles et d'être capables de raisonner objectivement, de voir les choses telles qu'elles sont - au lieu d'exprimer sans cesse des opinions sur des théories et des règles… L’esprit qui est compétitif, qui s’empêtre dans le conflit du devenir, et qui pense en termes de comparaison, est incapable de découvrir le réel. Une pensée-perception qui est intensément en éveil et lucide s'engage dans un processus constant de découverte de soi - découverte qui, étant authentique, est libératrice et créative. Toute tendance compulsive, toute activité spécialisée donne à l'esprit de l'acuité, ainsi qu'un moyen de focaliser la pensée, mais cela n'a rien à voir avec la floraison d'une pensée-perception pénétrant au cœur de la réalité. 
Il y a une énorme différence entre intellect et intelligence. L'intellect n'est autre que la pensée fonctionnant indépendamment de l'émotion. L’intelligence éclôt lorsque nous agissons en parfaite harmonie, tant sur le plan intellectuel qu'émotionnel. L’éclair de compréhension est lorsqu'il n'y a pas de verbalisation de la pensée. Faites-en l'expérience toute simple, et vous verrez surgir en vous ce flash de compréhension, cet éclair de lucidité fulgurante, qui surgit lorsque l'esprit est tout à fait tranquille, que la pensée est absente, que l'esprit n'est pas assourdi par son propre tumulte. Ainsi, toute compréhension, ne peut se faire que lorsque l’esprit est tout à fait tranquille.
Si vous avez des idées préconçues à votre propre égard, vous ne pouvez pas comprendre l’inconnu, qui est spontané. Le spontané  doit être l’inédit, l’inconnu, l’incalculable, le créatif, ce qui doit impérativement être exprimé, aimé, et en quoi la volonté en tant que processus de l’intellect qui contrôle, qui dirige, ne joue aucun rôle.
Observez vos propres états émotionnels et vous verrez que les instants de grande joie, d'immense extase, ne sont jamais prémédités : ce sont des événements imprévisibles, mystérieux, secrets.  
Krishnamurti : Le livre de la méditation et de la vie
1er septembre 
Nous nous prenons pour des intellectuels 
(...) Nous nous prenons pour d'authentiques intellectuels dès que nous pouvons citer d'innombrables œuvres, d'innombrables auteurs, avoir des lectures très diverses, et que nous sommes capables d'établir des corrélations et d'offrir des explications. Mais aucun d'entre nous - ou une si infime minorité - n'a de conceptions intellectuelles originales. A force de cultiver cet intellect - ou prétendu tel - nous avons perdu toutes les autres aptitudes, toutes les autres formes de sensibilité, et cela nous pose le problème de savoir comment rééquilibrer notre existence, non seulement afin de disposer des plus hautes aptitudes intellectuelles et d'être capables de raisonner objectivement, de voir les choses telles qu'elles sont - au lieu d'exprimer sans cesse des opinions sur des théories et des règles - mais aussi afin de pouvoir penser par nous-mêmes, et examiner de nous-mêmes  très attentivement le vrai et le faux. Et voilà, à mon sens, l'une de nos difficultés : cette incapacité à percevoir non seulement les choses extérieures,  mais aussi notre vie intérieure - à supposer que nous en ayons une.

2 septembre 
Toute pensée est distraction 
(…) Cette découverte de soi nous délivre de toute tendance à acquérir, et nous affranchit de la vie complexe de l'intellect. C'est cette vie complexe de l'intellect qui trouve sa satisfaction dans certaines tendances compulsives - que sont la curiosité destructrice, les spéculations, le simple savoir, l'exercice de nos talents, le commérage, et ainsi de suite ; et tout cela fait obstacle à une vie simple. (…) Se libérer de toute distraction est chose plus difficile, car nous ne comprenons pas pleinement le processus de pensée-perception, qui devient à son tour un moyen de distraction. (...) Cette pensée-perception à pouvoir de se créer ses propres obstacles, ses propres illusions, qui empêchent d'avoir conscience du réel. Elle devient donc sa propre distraction, son propre ennemi. Étant donné que l'esprit est capable de créer des illusions, il faut d'abord comprendre ce pouvoir pour qu'il puisse ensuite se libérer totalement des distractions qu'il s'est créé lui-même. L'esprit doit être parfaitement tranquille, silencieux, car toute pensée peut être une source de distraction.

3 septembre 
Unité du cœur et de l'esprit 
La formation de l'intellect n'a pas pour résultat de susciter l'intelligence. Mais en revanche, l'intelligence éclôt lorsque nous agissons en parfaite harmonie, tant sur le plan intellectuel qu'émotionnel. Il y a une énorme différence entre intellect et intelligence. L'intellect n'est autre que la pensée fonctionnant indépendamment de l'émotion. Lorsque notre intellect reçoit, sans qu'il soit tenu compte des émotions, une information orientée dans une direction particulière, quelle qu'elle soit, nous pouvons avoir un intellect hors pair, mais nous n'avons pas l'intelligence, parce que l'intelligence a en elle la capacité naturelle de ressentir aussi bien que de raisonner ; dans l'intelligence, ces deux capacités sont présentées de manière égale, intense et harmonieuse. 
De nos jours, l'éducation moderne développe l'intellect, diffusant de plus en plus d'explications sur la vie, de plus en plus de théories, mais il y manque cette qualité d'harmonie qu'apporte l'affection. 
(...) L'esprit - l'intellect - se satisfait de ces innombrables explications, mais l'intelligence n'est pas, car pour pouvoir comprendre, l'esprit et le cœur doivent agir en symbiose totale. 

4 septembre 
L'intellect corrompt la sensibilité 
Il y a, voyez-vous, d'une part l'intellect, et de l'autre la sensibilité pure - qui fait que nous aimons telle ou telle chose, que nous éprouvons de grandes émotions généreuses. L'intellect raisonne, calcule, pèse, équilibre. "Est-ce que cela vaut la peine? En tirerai-je un bénéfice ? "
Il y a, d'autre part, la sensibilité – ce sentiment extraordinaire qui naît au spectacle du ciel, face à votre voisin, votre femme ou votre mari, votre enfant, devant l’univers, la beauté d’un arbre, et ainsi de suite. Lorsque ces deux pôles de perception s'unissent – la mort est là. Comprenez-vous ?  Mais lorsque la sensibilité pure est corrompue par l'intellect - la médiocrité est là. (...) " Si je fais ceci, vais-je avoir cela en échange ? "

5 septembre 
L'intellect ne résoudra pas nos problèmes 
(...) Je dis qu’il est essentiel d'avoir cette sensibilité profonde à la vie, au lieu de se laisser piéger dans les ramifications de l'intellect, dans les discussions, dans les examens à réussir, dans les citations – écartant au passage ce qui est neuf, en prétendant que c'est du déjà dit. La voie, ce n'est pas l'intellect. Il ne résoudra jamais nos problèmes ; il ne nous apportera pas cette nourriture qui est impérissable. L'intellect peut raisonner, discuter, analyser, tirer des conclusions à partir d'inductions, et ainsi de suite ; mais il est limité, car il est le résultat de notre conditionnement. Il n'en va pas de même pour la sensibilité. La sensibilité n'est pas conditionnée ; elle vous arrache d'un seul coup au territoire des peurs et des angoisses...

6 septembre
Comprendre en un éclair 
Je ne sais pas si vous avez remarqué que la compréhension survient lorsque l'esprit est très silencieux, ne serait-ce que l'espace d'une seconde : l'éclair de compréhension est lorsqu'il n'y a pas de verbalisation de la pensée. Faites-en l'expérience toute simple, et vous verrez surgir en vous ce flash de compréhension, cet éclair de lucidité fulgurante, qui surgit lorsque l'esprit est tout à fait tranquille, que la pensée est absente, que l'esprit n'est pas assourdi par son propre tumulte. Ainsi, toute compréhension (…) ne peut se faire que lorsque l’esprit est tout à fait tranquille.  Mais cette tranquillité de l'esprit ne peut se cultiver, car si on la cultive, le résultat obtenu n'est pas un esprit tranquille, mais un esprit mort. 
Plus vous vous intéressez à une chose, plus vous voulez comprendre, plus votre esprit est simple, lucide, libre. Alors cesse toute verbalisation. La pensée, en effet, n'est faite que de mots, et c'est le mot qui fait obstacle. C'est l'écran des mots, c'est-à-dire la mémoire, qui s'interpose entre le défi, et notre réponse au défi. C'est le mot qui répond au défi, et c'est ce que nous appelons l'intellection. Et donc, un esprit bavard, qui verbalise sans cesse, ne peut pas comprendre la vérité – la vérité telle qu’elle est dans la relation, et non une vérité abstraite. Il n’existe pas de vérité abstraite. Mais la vérité est chose très subtile... Comme un voleur dans la nuit, elle vient quand on ne l'attend pas, secrète et mystérieuse. 

7 septembre 
L'intellect pris au dépourvu 
Vous ne pouvez vous connaître vous-même que lorsque vous n'êtes pas sur vos gardes, que vous ne calculez pas, ne vous protégez pas, que vous n’êtes pas aux aguets, prêt à guider, à transformer, à soumettre, à contrôler, lorsque vous vous voyez de façon inopinée,  c'est-à-dire quand l'esprit n'a aucune idée préconçue à son propre égard, quand l'esprit est ouvert, et ne se prépare pas d'avance à rencontrer l'inconnu.
Si votre esprit s'est préparé d'avance, vous ne pourrez assurément pas rencontrer l'inconnu, car vous êtes le connu. (...) Si vous avez des idées préconçues à votre propre égard, vous ne pouvez pas comprendre l’inconnu, qui est spontané.
Donc, la spontanéité ne peut jaillir que lorsque l'intellect n'est pas sur ses gardes, quand il ne se protège pas, quand il n'a plus peur de lui-même ;  et cela ne peut jaillir que de l’intérieur. Autrement dit, le spontané  doit être l’inédit, l’inconnu, l’incalculable, le créatif, ce qui doit impérativement être exprimé, aimé, et en quoi la volonté en tant que processus de l’intellect qui contrôle, qui dirige, ne joue aucun rôle.
Observez vos propres états émotionnels et vous verrez que les instants de grande joie, d'immense extase, ne sont jamais prémédités : ce sont des événements imprévisibles, mystérieux, secrets. 






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